Seul le compteur Linky serait intelligent ?
Par Michel Gay
Maintenant que le déploiement du compteur électrique Linky présenté comme « intelligent » est quasiment terminé, le rationnement imposé de l’électricité va pouvoir débuter… après plus de 20 ans d’impéritie.
C’est « intelligent »
Un projet de décret prévoit d’effectuer, dès cet hiver, un premier test en condition réelle au cours duquel la consommation d’électricité de 200.000 Français notifiés « par voie postale », et équipés d’un compteur Linky, sera plafonnée à 3 kilowatts (kW) au lieu de 6 kW (l’abonnement des particuliers en général) pendant quelques heures.
Avec ce test, le gouvernement souhaite « déterminer » s'il est « techniquement possible de mettre en œuvre un nouvel outil pour sauvegarder le réseau électrique en cas de tension extrême, pour éviter des coupures ».
Et c’est « intelligent » parce que cela aurait pu être pire…
En effet, l’entreprise ENEDIS ne limitera que la puissance délivrée au domicile des particuliers, alors qu’il aurait pu (ou dû) la couper complètement par défaut de production d’électricité !
Il faudrait se réjouir que la puissance de certains soit limitée temporairement (quelques heures pour 200.000 « cobayes ») afin d’éviter une coupure totale et généralisée… Soyons « solidaire » !
Jusqu’à récemment, avant l’ère des ruineuses énergies renouvelables intermittentes, le réseau électrique (pas intelligent) apportait à tous, à un prix raisonnable, toute l’électricité répondant au besoin de chacun, y compris en hiver lors des pointes de froid. C’était à la production électrique, notamment nucléaire, de s’adapter à la demande.
Dorénavant, ce sera à la demande (les clients) de s’adapter aux capacités de production restreintes, surtout en l’absence de vent et de soleil…
Idéologie verte, quand tu nous tiens
Avec de meilleures décisions politiques et moins d’idéologie verte antinucléaire peu judicieuse (idiote ?) focalisée sur le vent, le soleil, l’électricité serait toujours vendue aux particuliers aujourd’hui environ 12 centimes d’euros par kilowattheure (12 c€/kWh).
Sous la pression de la Commission européenne, des médias et de puissantes organisations écologistes infiltrées jusqu’au sommet de l’Etat, le prix de l’électricité augmentera jusqu’à 30 ou 40 c€/kWh... comme en Allemagne.
Cette folle tendance issue de mauvais choix stratégiques ruinera l’industrie (obligée de partir s’installer ailleurs) et les PME, et donc aussi les Français, dont beaucoup peinent déjà à régler leurs factures de chauffage et d’électricité.
Augmenter de 1000€ (et plus) par an le prix des factures d’énergie par famille (alors que l’ouverture à la concurrence devait faire baisser les factures, juré promis…), puis distribuer ensuite des chèques de 100 € ici et là pour amortir le choc des factures en prétendant faire du social est aberrant. Cela revient à appuyer sur l’accélérateur d’une voiture fonçant vers une falaise et prétendre sauver des vies en distribuant quelques airbags juste avant de s’écraser.
Dans les années 1940 jusqu’à 1949, il existait des tickets de rationnement (pas encore qualifiés d’intelligents) pour distribuer la nourriture devenue rare.
Aujourd’hui on qualifie de « smart » ou « d’intelligent » le réseau ainsi que le compteur Linky qui permettra dorénavant le rationnement… parce que de mauvaises décisions ont été prises depuis 20 ans par les gouvernements successifs.
« On n’arrête pas le progrès ! »
Il aurait peut-être été plus « smart » et « intelligent » de ne pas fermer les deux réacteurs nucléaires de 900 mégawatts (MW) de la centrale de Fessenheim en parfait état de fonctionnement ?
Les 1800 MW manquant de cette centrale représentent une puissance d’un kW pour presque 2 millions de familles … ou 3 kW pour 600.000 foyers.
Comment a-t-on pu en arriver là ?
Après la fermeture politique de trois réacteurs nucléaires en parfait état de fonctionnement (Superphénix en 1997 et les deux réacteurs de Fessenheim en 2020) et le retard à l’allumage de l’EPR de Flamanville la France se prépare maintenant à gérer une pénurie d’électricité devenue rare et chère alors qu’il aurait fallu mettre en service au moins quatre réacteurs depuis 20 ans.
En 2022, grâce à la fonctionnalité prévue à cet effet dans le compteur Linky, le gouvernement avait déjà voulu tenter de couper l’électricité à 10.000 Français, à distance, et sans leur demander leur avis.
Mais les tests effectués à « petite échelle » ont été désastreux : mécontentement de la clientèle et surtout échec technique.
En effet, sur les 10 000 compteurs Linky coupés à distance par Enedis, 500 compteurs ne se sont pas réenclenchés automatiquement en fin de coupure volontaire d’électricité.
Résultat : 500 déplacements d’agents Enedis chez les clients concernés pour remettre le courant manuellement.
Ces réenclenchements manuels à distance n’ayant pas fonctionné dans 5% des cas environ, Enedis n’aurait donc pas pu gérer ces coupures volontaires pour des millions de clients.
Enedis a donc abandonné (semble-t-il) cette méthode et veut maintenant en expérimenter une autre « plus douce » dont la possibilité technique est également offerte par le « compteur intelligent » Linky.
Au lieu de couper totalement le courant, il s’agit cette fois de brider à 3 kilowatts (kW) pendant 2 heures la puissance du compteur Linky pour 200 000 abonnés au moment d’une pointe de froid pendant l’hiver prochain 2023/2024.
Le test obligera les « cobayes » (qui seront, parait-il, dédommagés de 10 €) à couper leurs radiateurs électriques pour se limiter à 3 kW afin d’alimenter leurs autres appareils (réfrigérateur, congélateur, pompe de circulation du chauffage central, ordinateur, lumières, et une seule plaque électrique de cuisson).
Vous avez dit « équilibrage » ?
Actuellement, l’équilibrage du réseau repose entièrement sur les seules énergies « classiques » (nucléaire, gaz et hydraulique en France).
Le solaire photovoltaïque (PV) et l’éolien disposent d’une priorité d’accès au réseau sans rien payer pour gérer sa variabilité aléatoire ou son intermittence : ni frais de stockage ou d’effacement lorsqu’il n’y a pas de demande, ni le renforcement du réseau nécessaire pour absorber les surplus, ni parfois les prix négatifs en cas de folles surproductions.
Aujourd’hui en France, c’est donc principalement le nucléaire qui paie la facture de l’intermittence de ces sources d’électricité.
Cela revient à faire payer à mon voisin les factures d’entretien de ma voiture, puis de me vanter ensuite que ma voiture me coûte moins chère que la sienne ! C’est bien sûr une situation biaisée.
Mais à mesure que les énergies renouvelables intermittentes (EnRI) se développent, ce coût de gestion croît, et il devient de plus en plus lourd à assumer par les Français !
Mais si ces EnRI devaient payer la totalité des frais inhérents à cette intermittence, alors elles deviendraient une ruine pour leurs promoteurs dans un marché non faussé par les subventions publiques.
Une manne dont certains se gavent
Mon voisin est très heureux de la rentabilité de ses panneaux solaires photovoltaïques (PV) sur son toit (3 kWc installés en 2010 qui lui ont coûté 10 000 €). La revente de son électricité solaire représente pour lui un gain de 2000€ par an environ au tarif de… 62 c€/kWh indexé sur l’inflation pendant 20 ans ! (EDF vend son électricité 4,2 c€/kWh à ses concurrents).
C’est donc pour lui un excellent placement financier qui rapporte 20% par an (il s’agit en outre d’un revenu non imposable, sans CSG), beaucoup plus rentable qu’un placement sur un livret A (environ 3%)…
Mais ces 2000€ par an représentent une perte du même montant pour ENEDIS (obligé de lui acheter à ce prix). Ce dernier la répercute sur la facture des Français qui paient dans leur tarif électrique (en augmentation) cette subvention à travers une lourde taxe intérieure sur la consommation de produits pétroliers (TICPE, ex CSPE), elle-même en constante augmentation puisque de plus en plus de Français s’équipent en PV.
C’est aussi une perte pour l’entreprise EDF obligée de diminuer d’autant la production de ses centrales électriques (nucléaires ou non).
Mais EDF est toujours obligée de maintenir autant de centrales « classiques » (nucléaires ou autres) en activité qu’avant ces hérésies, car les jours (et les nuits) sans soleil et sans vent, le besoin d’électricité est souvent aussi important, voire plus.
Les EnRI avec priorité d’accès au réseau enrichissent des producteurs tout en étant une perte pour la collectivité et les distributeurs. Il y a de gros gagnants malins et beaucoup de petits perdants pigeons.
Bientôt, il n’y aura peut-être plus que de gros perdants…
Les punis seront-ils choisis parmi les clients des énergies dites renouvelables (ce qu’elles ne sont pas car les matières premières qui les composent ne le sont pas), intermittentes (ce qu’elles sont) qui polluent le réseau d’électricité ?
Heureusement qu’EDF réussi encore à alimenter le réseau, principalement avec le nucléaire, pour satisfaire les besoins des clients…
Seul Linky doit-il être intelligent ?
Le déploiement du compteur Linky « intelligent » a coûté quasiment le prix d’un réacteur nucléaire EPR.
Or, limiter la puissance électrique de 200 000 clients permettra de gagner au mieux 600 mégawatts (MW), et probablement moins de 400 MW, soit moins du quart de la puissance d’un EPR (1650 MW).
Il aurait été plus… « intelligent » de conserver les deux réacteurs nucléaires de Fessenheim (1800 MW) et de construire plusieurs EPR … plus tôt !
Les Français subissent depuis plus de 20 ans, contraints et forcés, le cruel manque de vision pour la France de nos dirigeants politiques indignes de leur confiance.